01 juillet 2006

La vie est un court exil...

The Day Dream, Dante Gabriel Rossetti, 1878.




La mère morte avait emporté, dans le désinvestissement dont elle avait été l'objet, l'essentiel de l'amour dont elle avait été investie avant son deuil : son regard, le ton de sa voix, son odeur, le souvenir de sa caresse. La perte du contact psychique avait entraîné le refoulement de la trace mnésique de son toucher. Elle avait été enterrée vive, mais son tombeau lui-même avait disparu. Le trou qui gisait à sa place faisait redouter la sollitude, comme si le sujet risquait d'y sombrer corps et biens.

Chez Chateaubriand, René, vit la mélancolie comme une douloureuse expérience de la lacération et de la perte. Monde vide que Dieu a déserté, qu'autrui a déserté. A couté la vie à sa mère en venant au monde. Dysharmonie avec soi-même et le cosmos. Rebut, dépossédé de soi-même ou possédé par une force mauvaise. La vie est un exil, une tragique séparation. Méditation sur des débris, pleurs sur des mortels, inanité des choses et vanité des entreprises, limites de la raisons, fragilité des travaux de l'homo faber.

Destin de vivre dans l'entre-deux entre Anciens et Modernes, entre deux siècles, entre passé et présent, entre immobilité et errance, entre petitesse et immensité, entre vie et mort, cadavre animé, âme prisonnière d'un corps pourri, enseveli.