30 avril 2006

L'art peint avec des mots, avec des sons, avec des couleurs, avec des lignes, avec des formes ; si ces moyens sont divers, les effets sont les mêmes.

Le Déluge, Anne Louis Girodet Trioson, 1806




La Princesse de Cadignan (Balzac)


- J'ai souvent accompagné, dit Daniel, mon ami aux Italiens, à l'opéra. Le malheureux courait avec moi dans les rues en allant aussi vite que les chevaux, et admirant la princesse à travers les glaces de son coupé. C'est à cet amour que le prince de Cadignan a dû la vie, Michel a empêché qu'un gamin ne le tuât.

- Eh bien! vous aurez un thème tout prêt, dit en souriant Blondet. Voilà bien la femme qu'il vous faut, elle ne sera cruelle que par délicatesse, et vous initiera très gracieusement aux mystères de l'élégance; mais prenez garde! elle a dévoré bien des fortunes! La belle Diane est une de ces dissipatrices qui ne coûtent pas un centime, et pour laquelle on dépense des millions. Donnez-vous corps et âme; mais gardez à la main votre monnaie, comme le vieux du Déluge de Girodet.

Après cette conversation, la princesse avait la profondeur d'un abîme, la grâce d'une reine, la corruption des diplomates, le mystère d'une initiation, le danger d'une sirène. Ces deux hommes d'esprit, incapables de prévoir le dénouement de cette plaisanterie, avaient fini par faire de Diane d'Uxelles la plus monstrueuse Parisienne, la plus habile coquette, la plus enivrante courtisane du monde.